A si J de la Rosière avait lu B Mandelbrot avant de rédiger son rapport. Il aurait pu préconiser la création d'une agence de notation basée sur des théories d'évaluation des risques cohérentes avec les observations.

Rappelons que la théorie de base utilisée par les agences surmédiatisées est celle de Bachelier, perfectionnée depuis un siècle mais basée essentiellement sur la copule de Gauss. Si bien qu'a chaque explosion de bulle (tous les 10 ans voire moins) l'évènement accidentel est prévu seulement tous les millions voire milliard d'années. Le B A ba de la démarche scientifique devrait imposer une remise en cause sérieuse. Mais les lobbys, les banques et la finance qui influencent largement les politiques, n'aiment pas reconnaître leurs erreurs aussi énormes soient-elles.

Tous ces gens sont très forts pour noyer le poisson sous couvert d'une complexité qu'ils entretiennent à dessein pour placer un écran de fumée. Ils ont poussé le bouchon assez loin, avec notamment les agences de notation qui ont expliqué devant les commissions d'enquête US, sans rire, qu'elles n'émettaient que des opinions. Elles rejettent donc toute responsabilité. Par contre elles encaissent les émoluments copieux attachés à leur « expertise ». Quand on connait en plus les conflits d'intérêts inhérents aux conseils qu'elle donnent aux financiers avant de labelliser les produits qu'elles ont préconisé, voire les régulateurs tourner la tête est dramatique.

Surtout les conflits d'intérêts, ont déjà généré la déconfiture de grands cabinets d'audit comme Arthur-Andersen. L'expérience aurait du imposer un minimum de régulation. Mais le dogmatisme des responsables US depuis les mandats de R Reagan, relayé en Europe par la dame de Fer, ont abouti à la déconfiture des régulateurs. La CFTC a été muselée en 1998 par L Summers et A Greenspan, et la SEC a aussi été privée de moyens pour surveiller l'explosion des CDS.

La formule choc de W Buffet au sujet de ces placements, qui ont été élevés au rang de thermomètre idéal par les adorateurs du marché autorégulé, est finalement trop douce. D'autant que le dogmatisme a poussé à se fourvoyer en acceptant les CDS à nu, qui sont une véritable aberration comme l'explique H Sterdyniak. Bref les CDS ne sont pas seulement des ADM en finances, ils sont bien des armes atomiques. Car si la crise éclate vraiment les valeurs notionnelles en jeu sont bien trop énormes pour que l'on puisse sauver quoique ce soit. Ce ne serait plus des milliers de milliards (les Trillions) qu'il faudrait mais des centaines de T$. Or le PIB mondial est de 60T$. On est donc sur des années de PIB mondial en jeu. Le mur serait infranchissable et effectivement on peut s'inquiéter sur les garanties d'état. Et comme les dérégulateurs ont accepté que ces dérivés soient hors bilan, il est bien difficile de savoir précisément où on en est. Bref le principe de précaution ne vaut pas pour la finance. Ou plutôt comme l'explique J Stiglitz la cupidité est bien plus forte.